Etapes : El Calafate ; Rio Pelque ; 13 km après Tapi Aike ; Puerto Natalés.
498 kilomètres pour environ 33 heures de selle.
El Chalten - El Calafate : ma plus longue étape, 219 km.
Toute la nuit il a plu et le vent a malmené la tente à nouveau, malgré les pares vents naturels plantés au camping El Relincho. Sur le coup de six heures la question se pose de mon départ pour El Calafate. Je traînasse dans le duvet avec la question : pars ou pars pas? Avant tout rangement je décide de prendre mon petit déjeuner à 8 heures (heure d'ouverture de la cuisine et salle commune). Echanges avec d'autres cyclos qui préfèrent rester au camping et se reposer plutôt que de repartir pour une nouvelle épreuve après le passage Villa O' Higgins-El Chalten, voir article précédent.
Au camping El Relincho. Sur la droite haie dense d'arbustes faisant office de coupe vent. |
Je range mon matériel et tente en compagnie d'un épais crachin, à 10 h. 15 je quitte El Chalten, plein est sur la route n° 23 pour rejoindre la route n° 40.
Après cinq kilomètres je franchis la ligne de limite de pluie. L'asphalte est bien sèche et le vent me pousse fortement dans le dos, même le soleil semble vouloir s'imposer, cependant il ne fait pas chaud. Je roule à 40 km/h au compteur sans forcer, parfois plus.
A peine quitté El Chalten et ses montagnes je me trouve en pleine pampa.
Au loin le lac Viedma.
D' El Chalten jusqu'au croisement avec la routa 40 sur la droite le lac Viedma m'accompagne toujours à bonne distance de la route 23. |
C'est dans la galère que le mental s'exprime.
Sur la route 23 en direction d'El Chalten je croise deux cyclistes poussant à pied arc boutés leur vélo. Etrange sensation lorsque votre vitesse est démultipliée grâce au vent ouest-est.
Dix kilomètres avant d'atteindre la routa 40 je trouve un trou pour m'abriter du vent sur le bas côté afin d'y pique-niquer. Ce ne sera pas long et à 13 h 15 je rejoins la fameuse route.
Horreur et stupéfaction maintenant je roule nord-sud et je prends le vent de face jusqu'à être obligé de poser pied à terre lorsque ma vitesse est insuffisante pour maintenir l'équilibre. L'extrême est du lac Viedma est sur ma droite, je le longe. L'hypothèse d'atteindre El Calafate ce soir s'estompe.
Je roule à moins d'une moyenne de dix à l'heure. Après une heure de lutte, dans la tête les calculs vont vite. Il me reste environ 120 kilomètres à parcourir et donc 12 heures de route à 14 h 15. Je me résigne je bivouaquerai ce soir.
Plus d'une heure plus tard vers 15 h 30 en quittant le lac Viedma le vent souffle différemment et je le prends trois quart dos d'ouest. Comment expliquer l'effet de cet immense lac sur le vent? Quoiqu'il en soit je m'adapte à cette nouvelle situation.
Plus tard j'aperçois bien un nouveau grand lac sur ma droite qui n'est autre que le lac Argentino, mais pris par ce moment d'immense tension qu'impose le challenge que je me suis fixé, je ne prends plus de photos depuis longtemps.
A une moyenne d'un peu plus de quinze km/h je quitte la routa 40 à 20 h et bifurque à droite sur la route 11, direction El Calafate. . L'hypothèse de me rendre demain au glacier Périto Moréno semble plausible.
Seulement voilà maintenant je roule est-ouest et j'ai le vent dans le nez. Il me reste 33 kilomètres pour atteindre mon but. Comme en début d'après midi je m'applique à pédaler consciencieusement contre cet élément qui décidément n'est pas arrangeant.
Dans ces moments là je revis certaines épopées sur de longues distances tels les Brevets de Randonneurs Mondiaux (BRM 200, 300, 400 et 600 km.) pour se qualifier puis réaliser les 1 230 km du Paris-Brest-Paris.
Souvenir aussi de cette flêche Vélocio de Pâques 2013 par équipe où l'esprit de camaraderie, malgré les rigueurs du froid, la nuit et une pluie constante, te permet d'assurer et d'aller jusqu'au bout des 24 heures de vélo imposées. Aujourd'hui je pense à Sylvain, Lionel et Joël mes trois compagnons d'équipe de l'ACBE du Perreux ils ne savent pas où je suis ni ce que je fais ici et maintenant mais j'entends leurs encouragements. Cette année là le club a aligné une seconde équipe et bien sûr j'ai également pensé à Agnès, Marie-Paule, Alain et Jacques. Vous aurez remarqué que pour cette équipe la parité est parfaite.
Vous allez croire que je divague, c'est peut-être vrai mais lorsque l'on se lance sur de longues distances il faut occuper la tête, laisser l'esprit vagabonder, réfléchir même tout en étant vigilant.
A 21 h 45 le ciel s'assombrit je m'impose le port de la frontale et allume le feu arrière. Sur la droite le lac Argentino forme une grande masse noire. A 23 h 30 j'arrive enfin à El Calafate tellement heureux d'être arrivé que je ne ressens pas la fatigue.
Comme j'ai déjà prévu mon hébergement je trouve très facilement l'hôtel "El Calafate". Le veilleur m'offre une chambre collective où deux anglais dorment. Toujours à la frontale mon dîner sera fait de barres de céréales et fruits. Je sais que les cars pour le glacier Périto Moreno partent à 8 h 30 je décide que je me lèverai à 6 h pour rejoindre la gare routière vers 7 h 30.
Le lendemain matin je quitterai la chambre sans avoir aperçu la bobine des deux dormeurs.
Je longe le lac Argentino jusqu'au parking donnant accès au glacier. |
Lac Argentino. |
Paysage autour du lac. |
La pampa au pied des montagnes. |
S'ensuit une série de vues du glacier Périto Moréno. |
La hauteur de cette masse de glace avoisine les 50/60 mètres au dessus du niveau du lac. |
Lorsque se décroche un bloc de sérac j'entends un craquement violent et une onde de choc provocant des vagues à la surface du lac. |
Une rencontre improbable!
Peut-être la seule photo à vélo, prise par Georges. |
Avec Georges, photo prise par son épouse. Croiser un copain à l'autre bout du monde prouve que l'improbable est toujours possible. On a convenu de se revoir à Paris. |
Mes premiers guanacos, de la famille des lamas. |
Tant au Chili qu'en Argentine les sanctuaires en souvenir d'accidentés de la route sont fréquents et souvent extravagants. |
La montée du col "Cuesta de Miguel" est longue de 16 km. En montant le col dernier regard sur le lac Argentino, |
Hacienda en contre bas du col. |
Pampa. |
Comment vous la trouvez ma route? |
Même question. |
Devinez la légende. |
Le Rio Pelque avant d'entrer dans le duvet. |
La pampa est cernée par des propriétaires issus de la colonisation. Comment ne pas l'oublier avec ces inscriptions. |
Arrivé à Tapi Aike un homme dépèce un nandou, de l'espèce des autruches. Depuis deux jours j'ai cru en voir au loin en pampa, mais beaucoup trop loin pour les photographier.
A Tapi Aike la route 40 est à nouveau asphaltée, je dois rouler plein ouest, autrement dit vent dans le nez. La progression est vraiment difficile. Quelques kilomètres plus loin en haut d'une côte j'aperçois Anne-Claire et Romain en train de faire du stop. "Éventuellement nous t'attendions me disent-ils en nous relayant nous devrions moins souffrir du vent".
Je partage ce point de vue. Chacun y met de la bonne volonté, mais le vent ne veut rien entendre, il est décidé à faire obstacle à notre avancée. Plusieurs fois nous nous immobilisons pour voir si sur le bas côté de la route il est possible de monter un bivouac. Rien n'a grâce à nos yeux, lorsque apparaît au loin les bâtisses d'un vieil hôtel délabré. Le lieu n'est pas agréable, mais nous sommes à l'abri du vent. Ce sera depuis le départ le seul bivouac sordide.
Lendemain matin pas envie de traîner dans ces lieux. Le vent a bien faibli et dare-dare direction les postes frontières pour un retour au Chili avec en prime entre les deux postes 13 kilomètres de ripio.
Anne-Claire et Romain sur leur tandem" Pino Hase" entre les deux postes frontières. |
Mais quelle légende vais-je pouvoir mettre à cette photo? |
Arrivée au poste frontière argentin. Il y a la queue en raison du contrôle des passagers d'autocars. Heureusement souvent mais pas toujours les guides me font signe pour passer devant leur groupe. |
Après le poste frontière chilien je retrouve la route 9. Je longe un petit lac, au loin sur la gauche la route vers Puerto Natalès. |
Elevage bovin. |
Du bord de la route. |
Arrivée sur Puerto Natalés. |
L'église de Puerto Natalés. |
La plaza. |
La rue Chorillos. |
Cet animal vous accueille en entrant en ville, manière de rappeler que dans un lointain passé cette contrée était son domaine. |
Un cycliste arrivant à Puerto Natalés. Croyez-vous qu'il a chaud? |
Cette sculpture rappelle l'existence des indigènes avant l'arrivée des colons. Prochainement je parlerai de cette triste histoire. |
Magnifique sculpture. Une femme et un homme se balancent au dessus de la mer à quelques dix mètres de haut. |
Maintenant je suis dans la région de Magellan et de l'Antarctique à l'extrême sud du Chili. C'est la région la plus étendue avec seulement une population de 160 000 habitants. Traversée par le Détroit de Magellan ce territoire accède indifféremment au Pacifique et à l'Atlantique. Le climat y est plutôt froid. Les deux grandes villes sont Puerto Natalés et Punta Arénas. Elevages, exploitation forestière, pêche, tourisme assurent le développement économique de ce territoire.
Puerto Natalès compte 20 000 habitants et son urbanisme est essentiellement constitué de maisons basses colorées aux toits en tôles peintes, ce qui réchauffe l'atmosphère de cette ville ventée. Outre qu'elle soit par son port une ville d'échanges elle a su devenir la base arrière du Parc National des Torres del Paine, C'est bien pour cela que je suis ici j'ai bien l'intention de faire une randonnée pédestre de plusieurs jours dans ce fameux parc classé au Patrimoine de l'Humanité par l'UNESCO. Cette aventure sera l'objet de mon prochain article.
Alors bientôt.